Les résultats sur le suivi par imagerie photo réalisée par le BRGM et la DEAL depuis 2017 au niveau de la plage Carbet Sud révèlent une tendance vers une érosion de 3 m par an. Ce suivi a pour but de détecter automatiquement la largeur du trait de côte. Ce dernier varie par rapport aux saisons. Les lignes sont mouvantes par rapport aux courants du sud et du nord.
Mercredi 24 Février, les scientifiques et océanographe du Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM) Mrs BOUVIER Clément et VITTECOQ Benoît , les représentants de la Direction de l’Environnement, de l’Aménagement et du Logement (DEAL) du pôle « Unité Littoral » Mme MONDESIR Gisèle et Mr QUEMART Philippe ont présenté face au Maire de la Ville , à son 1er Adjoint et à la responsable de l’Urbanisme , les résultats du suivi de l’étude sur l’érosion de la Plage du Coin. Un suivi qui porte sur 5 ans grâce à la photo par imagerie.
Le littoral Carbétien constitue un enjeu économique et environnemental. Pour la municipalité il s’agit de concilier enjeux environnementaux et économie. L’objectif de ce suivi est d’éclairer les élus sur la gestion du littoral et comment aménager le territoire par rapport à l’aléa érosion.
Sur le volet scientifique, Mr BOUVIER Clément précise que tout le profil de la plage , côté sud, s’érode et s’engraisse par rapport aux saisons : Pendant la période du carême ( Mars à Juin), l’érosion est plus forte au mois de Mai. La Plage du Coin est plus large en Mars qu’en Juillet. Durant la période de l’hivernage , le littoral dérive vers le Sud.
Le Maire, Jean –Claude ECANVIL a mis également l’accent sur le littoral côté Nord qui est aussi impacté par la houle (RN2 rendue impraticable par moments et la plage de l’ Anse Turin qui entre dans les terres). Des solutions devront être étudiées pour que les riverains de ce secteur soient mieux protégés. Une possibilité de suivi de ce côté versant sera nécessaire également.
Mr QUEMART Philippe : Directeur du Pôle Paysage, Eau, Diversité-DEAL :
« Si ce phénomène d’érosion est dit naturel, il est manifestement accentué par d’autres facteurs causés par les activités humaines : le prélèvement de sable, recul des mangroves au profit d’une artificialisation des côtes, urbanisation…Face à ce constat on peut facilement imaginer un avenir sombre des activités humaines sur le littoral avec des conséquences humaines, sociales et économiques notables. »
Mr BOUVIER Clément : Océanographe BRGM
A quoi sert ce suivi qui a été entrepris depuis 2017 ?
« Depuis 2017, le BRGM et la DEAL ont initié un réseau de suivi sur certaines plages du littoral Martiniquais dont celle du Carbet. Les objectifs de ces suivis réguliers sont de mieux appréhender les processus côtiers et de fournir des éléments d’aide à la décision pour l’aménagement du littoral. La mise en place de cet Observatoire de la dynamique du Littoral Martiniquais (OLiMar) permet de réaliser et de diffuser des observations actualisées sur l’évolution des plages de notre territoire. Un site internet est d’ailleurs en cours de finalisation et devrait voir le jour le mois prochain. »
2/ Comment expliquez vous cette érosion beaucoup plus marquée provoquée par la houle du sud ?
« Sur le littoral Carbétien, l’évolution de la plage est complexe car non uniforme et s’étale sur différentes échelles de temps.
- Par exemple, suite à un épisode de fortes vagues lié au passage d’un cyclone, en quelques heures ou quelques jours, l’érosion peut être très importante et entraîner un recul général de la plage.
- A l’échelle des saisons, le phénomène est plus complexe car il dépend du sens de propagation des vagues. Lorsque les vagues viennent du Nord, entre septembre et mars, le courant le long de la plage est orienté vers le Sud. Les secteurs situés à l’extrémité Sud du littoral Carbétien ont alors tendance à gagner du sable et la largeur de plage augmente.
Au contraire, lorsque les vagues viennent du Sud, c’est souvent le cas entre avril et juillet, le courant est orienté vers le Nord et ces mêmes secteurs ont fortement tendance à perdre du sable. La plage a alors tendance à reculer sur une dizaine de mètres pendant cette période mais le phénomène est temporaire puisqu’il s’inverse quelques mois plus tard. "
- Sur le plus long terme, la plage montre une tendance globale vers l’érosion.
3/ Face à ce phénomène d’érosion , quel message doit-on passer en priorité aux riverains et professionnels qui vivent près du littoral ?
« En effet à l’échelle des saisons, la largeur de la plage peut varier sur plus d’une dizaine de mètres selon les secteurs. Il est très important de comprendre que ces oscillations sont complètement naturelles et que le sable est simplement parti temporairement vers d’autres secteurs de la plage. A la prochaine saison, la plage retrouvera une situation semblable à celle qu’elle a connue l’année d’avant. Bloquer ce phénomène naturel aura inévitablement des répercussions très importantes sur les secteurs voisins. »
4/ Pouvez-vous nous faire une prévision pour les 10 ans à venir par rapport à l'érosion du littoral Carbétien ?
« Il est toujours difficile de prédire précisément l’évolution du littoral, en particulier lorsque la dynamique est aussi complexe que celle observée sur la plage du Carbet. Néanmoins, les études réalisées sur ce site ont permis de mettre en évidence un gain sur environ une vingtaine de mètres au niveau de la partie Sud de la plage et un recul d’une amplitude similaire sur la partie Nord depuis les années 50. Plus récemment, les observations réalisées depuis 2017 montrent une tendance à l’érosion avec une vitesse de recul moyenne de 1 m par an. Certains secteurs comme la partie Sud de la plage montrent des vitesses de recul plus élevées. La poursuite du réseau d’observations permettra d’affiner ces tendances et d’établir des prévisions de plus en plus précises. «
5/ La ville du Carbet est elle la seule à bénéficier d’un suivi sur la côte Caraïbe ?
« L’observatoire réalise des campagnes de mesure sur une quinzaine de plages. Sur la côte Caraïbe, nous suivons également la plage de l’Anse Céron. »
Le littoral Martiniquais présente de nombreux atouts naturels, paysagers, patrimoniaux , touristiques etc. D’où la nécessité du partage et de l’organisation de ces espaces afin de protéger, sauvegarder ces territoires littoraux de manière durable en conjuguant développement et urbanisation dans le respect des équilibres naturels.
Pour aider les Élus à gérer et informer la population un guide sur l’érosion du littoral confectionné par la DEAL avec le concours précieux de ses partenaires du Bureau de Recherche Géologique et Miniers et de l’ONF est accessible à tous sur le lien suivant :
http://webissimo.developpement-durable.gouv.fr/IMG/pdf/guide_erosion_littoral_cle7a511f.pdf
Ce guide a pour objectifs d’informer les différents intervenants , notamment les élus , sur l’évolution des plages du littoral , la nécessité de le protéger et de participer à une nouvelle gestion pour répondre aux différents défis du changement climatique.
Bientôt le site de l’observatoire de la dynamique du Littoral sera en ligne sous le nom de : OLIMAR